Le papier a de l'avenir parce qu'il a un passé

Je reviens sur mon post d'hier au sujet des prédictions sur la mort annoncée de la presse papier, totalement phagocytée par les terminaux numériques.

Je n'y crois pas. Et ce débat qui oppose papier au numérique me lasse au plus haut point.

Les analystes de tous poils ne semblent pas comprendre que chaque support répond à un besoin et à une clientèle précis. Et à un environnement aussi.

Il y a 10 ans, on nous prédisait l'avènement du zéro papier. Puis avec l'arrivée des eBooks, la fin du livre, so has-been. Au bout d'un an, les analystes ont finalement constaté que l'eBook ne décollait pas tant que ça, et que le papier faisait de la résistance. Peut-être parce que la notion de DRM ne s'y applique pas.
Et puis badaboum, Sir Steve dévoile son iPad, et là, tous ces analystes nous disent que forcément, l'avenir, c'est ça. Quel talent !

Mouais.
Je vais essayer d'être factuel, et de faire mes prédictions pour 2017 moi aussi.
En 2017, ce dont je suis sûr, c'est que :

  1. le numérique sera présent partout dans notre environnement, encore plus qu'aujourd'hui : maison, bureau, voiture, accessoires, jouets... Et donc, il se sera totalement banalisé, au point de ne plus faire rêver personne
  2. l'énergie sera un enjeu majeur, avec des risques de rupture d'approvisionnement liés soit à des pics de consommation, soit à des difficultés de production. Donc notre appétit insatiable de petits objets énergivores sera confronté à un manque de matière première.
  3. le recyclage sera sans nul doute encore plus valorisé qu'aujourd'hui, avec probablement des systèmes de taxes pénalisant les supports trop gourmands en énergie ou à l'obsolescence trop rapide.
  4. les entreprises auront toujours autant besoin de communiquer pour promouvoir leurs produits, et à cette fin, elles éprouveront toujours la nécessité de se différencier
Voilà pourquoi je suis convaincu que le papier a de l'avenir. Il a une histoire, et une véritable noblesse que 3 décennies de publicité de masse ont galvaudé.



Dans 5 ou 6 ans, lorsqu'il sera devenu banal de lire des actualités sur un écran, lorsqu'il sera convenu qu'il faut proposer un catalogue sur une tablette, lorsque nous serons gavés jusqu'à l'écoeurement de bannières clignotantes et d'animations criardes, vous pouvez être certain que le papier redeviendra à la mode, car il s'agira d'un moyen évident de se différencier. Et par le haut : le papier sera alors synonyme de luxe, de classe et de distinction.
A force de se goinfrer de pixels, les lecteurs retrouveront le plaisir de toucher du papier, et l'objet livre ou l'objet magazine témoigneront du souci de l'éditeur pour sa clientèle.

Vous ne me croyez pas ? Regardez la situation actuelle : nous sommes déjà saturés de newsletters, de blogs d'entreprise, de tweets, de SMS... Les entreprises n'ont jamais autant communiqué auprès de leurs clients. Pourtant, la société qui oserait aujourd'hui éditer un magazine papier à destination de ses clients disposerait à coup sûr d'un différenciateur important, qui valoriserait de façon très importante son image de marque. Pourquoi ? Parce que le support papier pose l'information, donne du recul, casse l'immédiateté et marque une rupture avec l'infobésité des canaux numériques. Et finalement, c'est reposant.

Le papier est noble, ne l'oubliez jamais. Certes, aujourd'hui, ces ors sont un peu ternis face au silicium. Mais la noblesse coule dans ses fibres, au point qu'il devient un havre de paix dans des mondes virtuels trop agités.

Et puis si l'on considère les facteurs énergétiques, je vous parie que lorsque nos sociétés seront confrontées à de véritables crises énergétiques, on redécouvrira les vertus simples d'un support passe-partout, renouvelable, échangeable et totalement passif. Un support qui peut fonctionner à la simple lueur d'une bougie.

Alors, s'il vous plaît, messieurs les analystes, arrêtez de nous fatiguer avec vos faux débats.
Chaque canal a sa place, chaque support a son usage. Les iPad comme les smartphone sont des outils formidables, nous sommes tous d'accord. Mais tout le monde n'a ni les moyens ni l'envie de les acheter. Et à eux seuls, ils ne sauveront ni n'achèveront la presse écrite.


P.S. : personnellement, il y a quelque chose que j'adore dans le print, et que les tenants du tout-numérique abhorrent, c'est l'absence de tout "analytics". Et oui, pas de code, pas de cookie, pas de traceur possibles dans une feuille de papier. C'est votre talent et votre imagination qui doivent faire tout le boulot pour attirer le chaland. Et ça j'aime bien.