Adobe, la forteresse assiégée
Comme beaucoup de leaders dans l'industrie du logiciel, Adobe s'est notamment développée en absorbant ces principaux concurrents à chaque étape de sa croissance. Aldus ou Macromedia par exemple.
Dans les années 2000, nombreux sont ceux qui ont pensé qu'Adobe avait réussi à détenir un quasi monopole dans le domaine de la création graphique, toutes facettes confondues :
- mise en page papier avec Indesign,
- retouche photo avec Photoshop,
- illustration vectorielle avec Illustrator,
- animation avec Flash,
- conception HTML avec Dreamweaver,
- framework de développement web / RIA avec Flex
- montage vidéo avec Premiere
- effets spéciaux avec After Effects,
- gestion de patrimoine photo avec Lightroom
Comme tout leader, Adobe a suscité les convoitises et titillé les concurrents. Au point qu'aujourd'hui, j'ai le sentiment qu'elle se retrouve dans la position d'une forteresse assiégée, subissant les assauts de ses concurrents et passant ainsi de l'action-anticipation à la réaction-défense.
Dans le domaine de la publication print, l'arrivée des nouveaux terminaux type iPad, ePub et autres a changé la donne de façon précipitée... Indesign dominait depuis quelques années le domaine ; mais aujourd'hui, les utilisateurs veulent plus de débouchés, plus de fonctionnalités, sans changer leurs habitudes et sans exploser la tirelire... La nouvelle version de Quark Xpress a ainsi défini un nouveau référentiel dans le domaine. Et pour la première fois depuis des années, Adobe s'est retrouvé dans ce domaine à jouer le suiveur, pressé d'introduire de nouvelles fonctionnalités pour ne pas prendre du retard.
Toujours en matière de publication interactive, Adobe a quelque peu tardé à lancer ses propres outils, même s'il semblait prudent d'attendre. Sa Digital Publishing Suite est concurrencée en haut par Woodwing qui a pris dans le domaine une avance considérable en équipant un grand nombre de grands titres de la presse écrite et en ouvrant son format. Mais aussi "en bas", par des solutions légères telles que celles d'Aquafadas, Quark Xpress ou d'autres webapps. Et qui ne manquent pas d'arguments.
Sur le web, le format de prédilection d'Adobe, Flash, est également mis à mal par la guerre que lui livre Apple d'une part en lui refusant l'accès à ses terminaux mobiles, et par la montée en puissance du HTML 5 d'autre part.
Bref, ça attaque de toutes parts...
Mais Adobe ne sera pas nécessairement Fort Alamo...
La concurrence a du bon, elle évite de s'endormir sur ses lauriers. Elle pousse à se réinventer, à se imaginer de nouvelles solutions, à revoir sa stratégie. Regardez Quark que l'on annonçait moribond il y a quelques années et qui ne cesse de se réinventer en reprenant petit à petit son leadership.
Je pense qu'Adobe attend le moment opportun pour frapper : elle laisse les loups sortir du bois pour mieux cerner la menace, et préparer une riposte efficace. Le Flash n'a pas dit son dernier mot, le marché des tablettes ne se résumera nécessairement pas à Apple et Indesign a du répondant à revendre.
Et puis Adobe sait encore ouvrir des brèches là où on ne l'attend pas : en témoigne la sortir de sa CS 5.5 en formule locative.
Le marché évolue, se transforme et est en passe d'achever sa mutation. Il est normal que les éditeurs bataillent férocement pour étendre leur pré carré, si possible en grignotant celui du voisin.
On verra où tout cela en sera dans 1 an ou 2 ! D'ici là, Adobe aura peut-être sorti le chéquier pour annihiler les ardeurs de concurrents trop féroces en les incorporant à son giron.